L’entreprise IN France a été sélectionnée par ENABEL et l’Office National de la Protection de l’Artisanat(ONPA) de Guinée pour construire le premier label textile de Guinée. Ce projet intervient alors que 79% des Guinéens n’achètent pas de textile fabriqué enGuinée à cause du rapport qualité prix. Une tendance qui s’accélère de génération en génération mais qui n’est pour autant pas une fatalité.
Le textile guinéen, un savoir-faire ancestral qui a un marché international
Le Lépi de Guinée est historiquement produit dans la région du Fouta. D’une dimension, couleur, densité et matière particulière, ce tissu est utilisé par des couturiers pour faire des habits traditionnels portés pour des événements exceptionnels. Ce savoir-faire est transmis de génération en génération mais par manque de perspective économique sur ce marché, beaucoup de jeunes préfèrent s’engager dans d’autres métiers artisanaux.
Une donnée parfois difficile à sourcer et à structurer
La région du Fouta compte plus de 1 000 artisans impliqués dans la production de ce précieux textile. Le double challenge de cette labellisation se trouve dans le recensement des artisans et ainsi que dans la prise d’information pour contrôler la qualité des textiles en sortie d’atelier. En effet, d’après une récente étude de Guinée Créative, 75% des artisans ne sont pas enregistrés auprès des institutions, +50% d’entre eux sont analphabètes et parlent 4 dialectes différents. Des challenges passionnants à aborder dans le cadre de cette labellisation.
Un objectif de 30 artisans labelisés d’ici fin 2023
La barrière liée à l’acquisition de données ne doit pas être un frein à l’objectif de labellisation de 30 artisans de Lépi guinéen d’ici 2023. Pour cette mission, nous priorisons le renseignement humain avec une équipe de 10 auditeurs projetés dans l’ensemble de la région du Fouta afin d’observer, structurer et labelliser les artisans dans des conditions parfois très dégradées (pas d’internet, pas de documents juridiques…)
Vers un Registre informel du Commerce et des Sociétés
Quand 75% des artisans ne sont pas enregistrés dans un registre et que les adresses postales sont informelles (par exemple : à 100m à gauche du rocher en forme de chien), nous devons trouver une façon fiable de les identifier et suivre. Nous avons retenu l’utilisation d’horodatage des artisans par leur position sur le globe terrestre (latitude longitude de leur atelier), l’attribution d’un code d’activité ainsi que l’utilisation de l’algorithme de Luhn pour leur générer un identifiant unique interne utilisé pour la labellisation. Cet identifiant permettra d’identifier l’artisan derrière chaque Lépi commercialisé ainsi que sa zone géographique en attendant qu’un travail de formalisation se fasse dans la région. Mais une autre barrière est à anticiper dans ce contexte de contrôle qualité d’un label textile.
Le conflit au Mali au cœur de la rupture d’approvisionnement de coton filé
La Guinée est un pays riche en matières premières dont du coton. Mais celui-ci n’est utilisable dans l’industrie du textile que s’il est transformé en fil. Or, la Guinée ne dispose plus d’usine de filage depuis 1982. Le pays est donc obligé d’exporter son coton vers ses voisins (Mali, Sénégal, Côte d’Ivoire) et de le réimporter filé pour l’exploiter dans son industrie textile. Au-delà des coûts importants liés à cet export/import, il en découle une dépendance étrangère forte à ses voisins. Depuis le début du conflit au Mali, le coton est devenu filé très rare donc très cher chez les commerçants le rendant inaccessible aux artisans donc aux consommateurs. Ce problème de souveraineté de sa filière textile devra être une priorité pour le gouvernement actuel afin de sauvegarder ce savoir-faire ancestral et limiter l’inondation de son marché par du polyester chinois ayant la réputation de créer des problèmes dermatologiques liés au climat local.
Une présentation du label au Salon International du Textile Africain (SITA) en novembre 2023
Le protocole complet de labellisation du Lépi de Guinée sera présenté lors du SalonInternational du Textile Africain (SITA) en novembre prochain devant plus de 17états membres de l’Organisme Africain de Propriété Intellectuelle (OAPI) ainsi que des centaines d’autres pays, permettant de redonner ses lettres de noblesses à la filière textile guinéenne ainsi qu’à ses couturiers et teinturiers.