Évolution de la mesure de l'impact sociétal en France et nouveaux indicateurs

L'évaluation de l'impact sociétal, c'est-à-dire l'influence qu'une organisation ou un projet a sur la société, est devenue un enjeu majeur en France au cours des dernières décennies. En effet, les entreprises, les organisations non gouvernementales, les institutions publiques et même les citoyens cherchent de plus en plus à comprendre et à quantifier leur contribution à la société. Cette évolution est le résultat d'une prise de conscience croissante de l'importance de l'impact sociétal dans la prise de décision, ainsi que d'une réflexion sur la manière de mesurer cet impact de manière plus précise et holistique.

‍

1 - Évolution de la mesure de l'impact sociétal en France

Années 1990 - Les débuts de la mesure de l'impact sociétal en France

Les prémices de la mesure de l'impact sociétal en France remontent aux années 1990, lorsque les entreprises ont commencé à considérer l'impact de leurs activités sur l'environnement et la société. Les premières tentatives de mesure se sont concentrées sur des domaines spécifiques tels que l'empreinte carbone, les indicateurs de responsabilité sociale et la diversité. Ces mesures étaient volontaires, laissant aux entreprises la flexibilité de choisir leurs priorités sans obligation gouvernementale. Cependant, ce volontarisme a souligné le besoin de normes et de cadres internationaux, comme les Principes directeurs de l'OCDE (première édition en 1976), pour encourager des pratiques responsables.

En 1992, l'ONU a défini les 3 piliers du développement durable : économique, environnemental et social. Il s'agissait alors de sensibiliser les États et les grandes entreprises à concilier ces dimensions face à des ressources naturelles épuisées mondialement et à une croissance démographique importante depuis les années 50.

‍

Années 2000 - L'émergence de la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE)

Au début des années 2000, la France a connu une évolution significative avec l'introduction de la RSE. La loi NRE (Nouvelles Régulations Économiques) de 2001 a imposé aux entreprises cotées en Bourse de publier des informations sur leur politique RSE, initiant ainsi une prise de conscience croissante quant à la nécessité de mesurer et de rendre compte de l'impact sociétal des entreprises.

Les lois issues du Grenelle de l'environnement en 2007 ont accru la pression sur les entreprises pour les encourager à intégrer la préservation des espaces naturels dans leur stratégie. Cela concerne désormais un nombre croissant d'organisations, y compris celles ayant 500 salariés ou plus. Parallèlement, de nombreuses PME ont adopté des pratiques RSE pour répondre aux exigences croissantes de leurs clients ou par conviction en faveur d'une économie plus équitable et d'un environnement plus sain.

En 2010, la norme ISO 26000 est apparue comme un outil mondial pour le développement durable. De nombreuses entreprises l'ont adoptée pour structurer leur approche RSE. En France et ailleurs en Europe, des labels ont été créés pour valoriser les pratiques RSE.

‍

2019 - L'adoption de la loi Pacte

L'année 2019 a été un tournant majeur dans l'évolution de la mesure de l'impact sociétal en France avec l'adoption de la loi Pacte (Plan d'Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises). Cette loi a introduit l'entreprise à mission, un nouveau statut d'entreprise qui place l'impact sociétal au cœur de son objet social. Les entreprises à mission sont tenues de définir et de publier des indicateurs de performance extra-financière liés à leur mission sociétale. Cette avancée a renforcé l'engagement des entreprises envers la société et leur responsabilité en matière d'impact positif (ex: B-corp, Fair Trade, EU Ecolabel, LUCIE …)

‍

Années 2020 et à venir…

• L'intégration de l'impact sociétal dans les politiques publiques

En 2020, la France a promulgué une loi sur l'économie circulaire favorisant la réutilisation, le recyclage et la durabilité des produits, incitant ainsi les entreprises à adopter des pratiques durables. De plus, les pouvoirs publics évaluent désormais leur propre impact sociétal, envisageant l'adoption d'indicateurs de bien-être tels que le Bonheur Intérieur Brut (BIB) en complément du Produit Intérieur Brut (PIB) pour mesurer la qualité de vie des citoyens, la santé, l'éducation, l'environnement, et d'autres aspects du bien-être collectif.

• La montée en puissance de l'investissement à impact

En France, l'évolution de la mesure de l'impact sociétal a influencé le secteur financier. Au cours de la décennie précédente, l'investissement à impact a fortement progressé, attirant des investisseurs, notamment des fonds, des banques et des particuliers, recherchant des opportunités d'investissement à la fois rentables et socialement ou écologiquement bénéfiques. Des fonds d'investissement à impact ont été créés pour soutenir des projets liés à des objectifs sociaux et environnementaux spécifiques (ex: Amundi, Mirova, France2i …). De plus, la France a encouragé la finance verte en favorisant les investissements dans des initiatives environnementales par le biais d'émissions d'obligations vertes. Depuis 2020, les entreprises cotées en France sont tenues de publier des informations ESG (environnement, social, gouvernance) dans leurs rapports annuels, les engageant ainsi à rendre compte de leur performance en matière de durabilité et d'impact sociétal.

‍

2 - L'importance des nouveaux indicateurs

En France, l'évaluation de l'impact sociétal va au-delà des indicateurs traditionnels tels que les émissions de gaz à effet de serre ou le chiffre d'affaires. De plus en plus, entreprises et organisations adoptent des indicateurs plus complets et nuancés pour mesurer leur influence. Voici quelques-uns de ces indicateurs.

1. Inclusion sociale : Mesurer l'inclusion sociale permet de comprendre dans quelle mesure une organisation crée des opportunités équitables pour tous, y compris les groupes défavorisés. Cela peut inclure des indicateurs tels que le taux d'emploi des minorités, l'accès à l'éducation, et la promotion de la diversité au sein de l'entreprise.
2. Diversité : La diversité en termes de genre, d'âge, d'origine ethnique, etc., est un indicateur important de l'ouverture et de l'égalité au sein d'une organisation. La diversité peut favoriser l'innovation et la créativité.
3. Innovation sociale : Les entreprises cherchent de plus en plus à mesurer leur impact dans la création de solutions innovantes pour résoudre des problèmes sociaux. Cela peut inclure des indicateurs liés au développement de produits ou de services socialement bénéfiques.
4. Qualité de vie au travail : L'évaluation de la qualité de vie au travail est essentielle pour comprendre le bien-être des employés. Des employés satisfaits sont plus productifs et engagés, ce qui peut se traduire par une meilleure performance globale de l'entreprise.
5. Contribution à la communauté locale : Mesurer la contribution d'une entreprise à sa communauté locale permet de quantifier les avantages économiques, sociaux et environnementaux que l'entreprise apporte à son environnement immédiat.

L'intégration de ces nouveaux indicateurs permet aux entreprises d'évaluer leur impact sociétal de manière plus holistique, identifiant les besoins d'amélioration, favorisant la transparence envers les parties prenantes, et répondant aux attentes croissantes en matière de responsabilité sociale et environnementale. Ceci renforce la confiance du public et génère une valeur durable pour l'entreprise.

‍

Conclusion

En conclusion, l'évolution de la mesure de l'impact sociétal en France témoigne d'un changement significatif dans la manière dont les entreprises, les organisations et les institutions considèrent leur rôle dans la société. Les nouvelles lois et réglementations, ainsi que l'adoption de pratiques de gestion plus responsables, contribuent à renforcer l'engagement envers un impact sociétal positif. La mesure de cet impact est devenue plus précise, inclusive et globale, reflétant ainsi une vision plus complète de la contribution de chacun à la société. Cela annonce une ère où l'impact sociétal devient un indicateur clé de succès, aux côtés des indicateurs financiers traditionnels, tout en façonnant la façon dont les entreprises et les organisations définissent leur succès et leur rôle dans la société.